Bienvenue dans le monde dématérialisé et sans fil, d’Internet, du numérique, de la réalité virtuelle et du Big Data. C’est dans cette illusion, créée et alimentée par les multinationales du secteur (les fameuses GAFAM), les grands médias et les pouvoirs publiques, que nous baignons et à laquelle nous croyons plus ou moins volontairement. Quand nous envoyons un courriel, reçu quasi instantanément par son destinataire, quand nous marquons d’un « Like » un message publié sur les réseaux « sociaux », visionnons une vidéo ou partageons celle de nos vacances sur Facebook ou WhatsApp, nous n’imaginons pas l’énergie mobilisée ni l’itinéraire emprunté par notre message, qu’il soit personnel ou professionnel, utile ou futile. C’est cette illusion que déconstruit le journaliste Guillaume Pitron en expliquant dans son livre très documenté que l’Internet et tous ses réseaux de transmission constitue la plus grosse infrastructure de télécommunication que l’humanité n’ait jamais construite. Et cette infrastructure planétaire apparaît comme une source majeure de consommation d’énergie, de matières premières, d’eau et d’espace, bref de pollution. Que ce soit par la fabrication des 34 milliards de téléphones, tablettes et ordinateurs qui circulent dans le monde et des puces électroniques qu’ils contiennent, la construction et le fonctionnement des 3 millions de Datacenters, ces usines numériques par lesquelles transitent nos Like et nos vidéos de chats (et consomment 10 % de l’électricité produite sur la planète), et enfin les dizaines de milliers de kilomètres de câbles dont une bonne partie sous-marins, le filet numérique (Net en anglais) s’annonce déjà comme une gigantesque gabegie énergétique et un désastre écologique. Et c’est sans compter ses nuisances humanitaires et anthropologiques ni ses conséquences politiques et le monde sécuritaire qu’il sous-tend. Alors, que faire pour faire cesser cette course en avant infernale ? Du côté des solutions, les conclusions de l’auteur sont décevantes. Alors qu’on pourrait naturellement s’attendre à l’urgence de débrancher le monde, Guillaume Pitron en appelle à un numérique éthique et vert, citant pour étayer son propos des experts du secteur comme l’ONG Waag Society ou les éditeurs de logiciels libres comme Libreplanet ou Framasoft. A lire d’urgence pour se remettre les idées en place.
« L’enfer numérique » de Guillaume Pitron – Les liens qui libèrent 2023
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